Hitchcock et la psychanalyse | Pas de printemps pour Marnie

Blog | Sophie Cohen psychologue Paris 5e

Marnie vole dans la caisse des entreprises qui l’embauchent et ment à tous ceux qu’elle côtoie. Elle change de ville et d’identité et recommence à voler. Elle pourrait reproduire ce même scénario durant toute son existence si Sean Connery, nouvelle figure d’amoureux-guérisseur, n’avait décidé de la sauver. Marnie a vécu un traumatisme, c’est certain ! Il décide de l’aider à le retrouver pour la sortir de ce cercle infernal. L’événement traumatique, à l’origine de ses symptômes, est le souvenir d’une petite fille qui attend sa mère se prostituant dans la pièce voisine, seule, terrorisée, alors que l’orage éclate. Et qui tue l’homme qui brutalise sa mère. Une fois le souvenir retrouvé, elle n’est plus voleuse, elle n’est plus mythomane, elle n’est plus frigide et peut enfin s’abandonner à Sean Connery.

Le symptôme au centre du traitement

L’idée du film – l’héroïne sera guérie une fois retrouvées les circonstances du trauma dont découlent ses symptômes – est séduisante mais un peu facile.

Aux débuts de la psychanalyse, le moment de la formation du symptôme était bien au centre du traitement. De nos jours, l’approche psychanalytique ne vise pas uniquement à isoler et à traiter un symptôme mais préfère le considérer comme un signe, comme une « formation énigmatique ». En outre, le symptôme a une fonction. Car l’événement traumatique, clé de voute de l’intrigue dans plusieurs des films d’Hitchcock, passe par le filtre de la subjectivité d’un individu. Ce qui compte, c’est moins la réalité historique que la réalité psychique.

Une fois le symptôme encombrant disparu, un autre travail peut commencer, sur une autre scène. Travail qui vise à modifier, à déplacer ce qui a rendu nécessaire l’apparition du symptôme.  Et c’est là ce qui distingue l’approche psychanalytique d’autres types de thérapies.

Le cadre, la relation au thérapeute, favorisent le réveil de ressentis enfouis, nichés dans l’enfance, qui peuvent enfin refaire surface dans le cadre rassurant du cabinet. Sorte de laboratoire où peuvent se rejouer, pour mieux les dépasser, des peurs archaïques, des passions enfantines, où peuvent émerger des désirs délaissés.

Le chemin qui conduit à ces éléments refoulés est aussi important que le traumatisme en lui-même. Un individu singulier à un moment particulier de son existence a fait le choix, pour un motif qui lui est propre, d’emprunter ce chemin. Cette traversée de l’intime ne peut être la même pour tous.

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